La bataille des pots par Mireille Héros
Le pot de fer et le pot de terre tiennent un conseil de guerre. L’heure est grave, les pots en plastique en envahissent les cuisines.
Le pot de fer avec superbe distribue les rôles. « Il nous faut un chef, je suis celui-là ». Le pot de terre tout intimidé n’ose contrer un allié qui en impose autant. Cependant, il perçoit dans la voix du pot de fer, qui rameute ses ouailles, une légère hésitation. « Bizarre, bizarre. Je le pensais plus fort que ça. Cherchons la faille de ce prétentieux qui me prend pour un lourdaud.»
Le pot de fer à grands renforts de cris constitue son armée. Le pot de terre remarque un légère claudication chez son allié. Le moindre chaos déclenche une grimace de douleur. « Toi mon pote, se dit le pot de terre, tu as bon pour l’ostéopathe ». Néanmoins, le pot de fer s’accroche. Il tient la barre. Pas question d’abandonner, cette bataille il doit la gagner. Et ce pot de terre, ce paysan, il se prend pour d’Artagnan ! Soudain, une petite voix lui murmure à l’oreille : « ne joue pas les fanfarons. Un pot bien baraqué pour écraser les pots en plastique, ça peut être utile ».
Un choc titanesque se prépare. Les armées sont face à face, prêtes à en découdre. Les plastiques dans leur habit blanc partent dans tous les sens, persuadés que leur légèreté déroutera leurs adversaires. C’est la foire d’empoigne.
Du côté des pots en dur, on croise le fer non pas contre le plastique mais contre la terre. Les pots en fer n’ont qu’une idée : fracasser leurs copains en terre. Les dégâts sont immenses. Quand, contre toute attente, le pot de fer demande grâce au pot de terre : « je suis attaqué par la rouille. Vite, emmenez-moi chez le chaudronnier pour me refaire une santé ». Le pot de terre, bonne pâte de répondre : « voyez, Messire, on a toujours besoin d’un plus gros que soi ».
Mireille Héros
26 février 2021